Visiblement, nous sommes entrés sans crier gare dans une zone de grandes turbulences que le désordre économique et monétaire durable, arbitrairement installé et irrationnellement poursuivi par des élites procédant peu ou prou du vote lointain de peuples divers, ne va sûrement pas contribuer, tout le démontre, à conjurer tant la prise de risque politique se révèle finalement des plus aventureuses.
La Grèce aux abois, au bord du défaut de paiement dans la zone euro et sur le fil du rasoir de son appartenance à l’UE, se trouve aujourd’hui en bonne place pour capter toute notre attention. Pour la petite histoire, cette situation particulière m’a conduit, en remontant dans le temps jusqu’à la Grèce antique, à constater l’étonnante symétrie entre le théâtre de Delphes et l’Assemblée de Strasbourg... Mais refermons la parenthèse.
Ainsi, sous l’effet inouï d’une formidable rupture technologique appelée à bouleverser les habitudes les plus ancrées, nous sommes entrés dans une période révolutionnaire de grands changements faisant alors que les institutions, pourtant solidement fondées sur l’état de Droit, se trouvent de facto à revisiter puisqu’il nous faut désormais intégrer l’idée-force que tout ne sera plus comme avant !
Dans ces conditions, que je qualifierais d’extrêmes tant les mentalités s’en trouvent aussi fortement chamboulées, parler de révolution copernicienne des esprits ne me paraît pas exagéré dès lors que, jaillissant comme un diable de sa boîte, l’ordre immatériel devient la norme gouvernant toutes les nations y compris les moins avancées pour lesquelles il s’agit d’une chance extraordinaire.
Si l’on fait abstraction de la gestion du défaut possible de la Grèce et plus généralement de la difficulté des Etats membres surendettés à redresser leurs comptes, mon propos vise plus spécialement à déterminer si nos élites bien en cour ont la capacité de conceptualiser les temps nouveaux auxquels nous sommes tous confrontés : pour le dire crûment, peut-on vraiment leur faire confiance en matière d’expertise ?
Car sans vouloir faire un procès d’intention à quiconque, force est tout de même de faire le constat que les élites qui nous gouvernent, tant au niveau national qu’à l’étage supérieur où officient les technocrates de la Commission européenne, exercent leurs prérogatives le plus souvent sans trop tenir compte de la volonté des peuples divers dont, pourtant, ils sont les débiteurs privilégiés.
En l’occurrence, il ne s’agit pas de tenir ici un discours stérile aux accents populistes faisant la part belle au ressentiment mais néanmoins, en toute honnêteté intellectuelle, de s’interroger sur la capacité des responsables qui prétendent nous gouverner à honorer leur mandat tant sur le plan institutionnel que sur le plan humain, ce dernier, suivez mon regard, revêtant une importance de plus en plus prépondérante dans nos sociétés.
Christian Lambert, ancien ambassadeur de France qui donc sait de quoi il parle, a commis dans Les 4 Vérités un article incendiaire (ICI) intitulé : “Vers une 3e guerre mondiale” qui débute ainsi :
“La médiocrité des dirigeants occidentaux, du moins de beaucoup d’entre eux, est telle qu’ils commettent des erreurs gigantesques et meurtrières. Sélectionnés par un système démocratique d’apparence, mais en fait démagogique et corrompu, ils sont généralement dépourvus de jugement et prennent de ce fait des décisions désastreuses (...) Le résultat de ces erreurs dues à l’idéologie, à la naïveté et à l’ignorance est là. Il est accablant”.
La Grèce est un cas d'école que les technocrates de Bruxelles ne parviennent manifestement pas à résoudre. Pas plus d'ailleurs qu'Alexis Tsipras qui, pris au piège de sa propre dialectique, a clairement décidé de jouer au chat et à la souris avec ses créanciers donnant alors lieu à un jeu de massacre dont personne ne sortira indemne. L'impossible Europe que l'on s'acharne à édifier à grand frais doit donc faire, au prix fort, son examen de conscience.
Librement !
Philippe S. Robert
FRANCE
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