Le prix Nobel d’économie (1974) Friedrich August von Hayek (1899-1992) a prononcé, devant la société du Mont Pèlerin, le discours de clôture (ICI) de la conférence du 3 mars 1984. Dans ce discours et dans le droit fil de son ouvrage “La route de la servitude”, paru en 1944, Hayek fait à nouveau le procès du socialisme :
“Ce sont les intellectuels qui ont créé le socialisme, l’ont propagé, avec les meilleures intentions, à partir d’une erreur de fait, à partir de ce que j’appelle, dans un livre à quoi je travaille en ce moment, une vanité fatale, l’idée que la raison humaine est assez puissante pour réorganiser délibérément la société au service de buts connus et prévus à l’avance. C’est une illusion intellectuelle, on s’en rend compte maintenant”.
Poursuivant son vibrant et éclairant exposé, Hayek explique pourquoi, selon lui, le socialisme est tout entier fondé sur les bases d’une présomption fatale, c’est-à-dire la croyance que l’intelligence, à l’exclusion de toute autre considération en particulier morale, doit être tenue pour seul et unique moteur du progrès humain.
“Nous découvrons progressivement (...) que ce n’est pas seulement à l’intelligence dont nous sommes dotés que nous devons d’avoir pu bâtir l’ordre étendu de l’humanité (...) mais qu’il existe un deuxième héritage, aussi important (...) Un héritage moral qui consiste essentiellement dans la croyance en la propriété, l’honnêteté et la famille, trois choses que nous ne pouvions pas et n’avons jamais pu justifier intellectuellement, mais dont nous sommes obligés de reconnaître que nous leur devons notre civilisation”.
Par conséquent, termine Hayek, “Nous devons retourner à un monde où notre vie est guidée non pas par la seule raison, mais par la raison et la morale, en partenaires égaux, où la vérité de la morale est tout simplement celle d’une tradition morale, celle de l’Occident chrétien qui a façonné la morale de la civilisation moderne”.
A ce sujet, on ne peut hélas que constater la fureur avec laquelle les socialistes français, comme s’ils sentaient venir leur fin prochaine, se sont lancés dès leur retour au pouvoir, en 2012, dans une série de folles réformes de société visiblement destinées à évacuer manu militari tout ce qui permet, encore aujourd’hui, à une nation de se maintenir.
Se situant dans la perspective des malheurs répétés de la Grèce, Patrick de Casanove, président du Cercle Frédéric Bastiat, a récemment publié un article (ICI) dans lequel il démontre à quel point l’action des constructivistes européens et grecs a conduit, de proche en proche, ce pays à se fourvoyer sur la route de la servitude !
Mais ce qui m’a littéralement enthousiasmé dans cet article, c’est la vision audacieuse que développe M. de Casanove qu’il aurait peut-être mieux valu mettre en oeuvre, bien sûr dans une perspective libérale, afin d’éviter ce rendez-vous manqué de la Grèce avec la zone euro et plus largement avec l’Union européenne. En voici les termes :
“Il y avait pourtant une opportunité extraordinaire à saisir avec le résultat de ce référendum. Cette chance consistait à prendre acte que les Grecs ne voulaient plus se faire spolier, piller, pour sauver l’Etat grec en se couchant devant le super Etat européen, alors qu’eux-mêmes auraient sombré dans la misère. Elle consistait à prendre acte que les Grecs ne voulant pas se laisser imposer quoi que ce soit, surtout pas des mesures spoliatrices, il fallait qu’ils se décident à titre personnel. Elle consistait à leur proposer de prendre directement leur destin en main, d’assumer la responsabilité de leur vie et de leurs choix. Cela serait revenu à organiser le repli de l’Etat et le retour des libertés individuelles. C’est-à-dire remettre réellement l’Homme au coeur du système puisque chaque individu redeviendrait propriétaire et décideur de sa vie (...) La Grèce est au bord du chaos (...) la seule réforme structurelle est de mettre fin à l’Etat-providence. De toute façon, il est en faillite (...) C’est le retour de l’”action humaine” et des incitations (...) Ce n’est pas ce que fera Tsipras, ni ce que préconisent les Européens”.
Patrick de Casanove justifie sa proposition libérale, certes inintelligible pour les esprits corrompus par l’idéologie socialiste, en faisant appel à Frédéric Bastiat, ce qui est bien légitime dans sa position et de la meilleure facture patriotique puisqu’il s’agit de rappeler une fois de plus aux Français que la pensée de Bastiat, fondée sur un grand bon sens, représente la façon la plus aboutie de concevoir et de régler les questions relatives au bon fonctionnement d'une société libérale :
"Se conserver, se développer, c’est l’aspiration commune à tous les hommes, de telle sorte que si chacun jouissait du libre exercice de ses facultés et de la libre disposition de ses produits, le progrès social serait incessant, ininterrompu, infaillible.” – Frédéric Bastiat “La Loi”
On ne peut pas demander à un Président socialiste, même s’il prétend avoir été touché par une grâce libérale de façade, de prendre Frédéric Bastiat pour exemple afin de gouverner sainement. Bien au contraire, François Hollande aggrave tragiquement le cas de l'UE en plaidant pour un gouvernement économique européen...
Librement !
Philippe S. Robert
FRANCE
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